Le traitement fiscal des options d’achat d’actions octroyées à des employés est bien établi par la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada) (la « LIR ») et les observations connexes. On trouve plus précisément à l’article 7 de la LIR les règles d’imposition des options d’achat d’actions octroyées à des employés. Ces règles ne s’appliquent toutefois pas aux options d’achat d’actions octroyées à des entrepreneurs indépendants[1], si bien que le traitement fiscal propre à ces options est souvent méconnu.

Selon le paragraphe 9(1) de la LIR, le revenu qu’un contribuable tire d’une entreprise pour une année d’imposition est le bénéfice qu’il en tire pour cette année. En conséquence, si une option d’achat d’actions est octroyée à l’égard de services rendus aux termes d’une relation d’entrepreneur indépendant, l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») considère que la juste valeur marchande (la « JVM ») de l’option sera incluse dans le revenu que le contribuable aura tiré de son entreprise en vertu du paragraphe 9(1) pour l’année de l’octroi[2].

La JVM de l’option octroyée ne devra pas nécessairement être incluse en entier dans le revenu si les droits afférents à l’option ne sont pas acquis en totalité ou en partie dès la date de l’octroi. L’ARC ne s’est pas prononcée directement sur les conditions d’acquisition des droits. Cependant, certaines décisions vont dans le sens de la position voulant que l’acquisition des droits ou la satisfaction de conditions préalables soient des conditions indispensables à l’inclusion dans le revenu[3]. Cela fait dire à l’auteur que seules les options dont les droits ont été acquis au cours d’une année devraient être incluses dans le revenu tiré d’une entreprise pour l’année en question. À l’acquisition des droits, la JVM des options serait donc être incluse dans le revenu de l’entrepreneur indépendant pour l’année concernée.

La détermination de la JVM d’une option d’achat d’actions est une question de fait. Cependant, l’ARC considère que la valeur d’une option d’achat d’actions correspond à la plus élevée des deux suivantes :

  1. la valeur commerciale des droits attribués; et
  2. l’excédent de la juste valeur marchande des actions visées par l’option au moment de l’octroi de l’option sur le prix de levée prévu pour l’option[4].

Selon le mécanisme d’évaluation ci-dessus, l’ARC accepte que, s’il n’y a pas de marché pour les options et que le prix de levée est égal ou supérieur à la JVM des actions au moment de l’octroi, il n’y a pas d’avantage[5]. L’ARC semblait accepter que cela pouvait être accompli en veillant à ce que le régime d’options d’achat d’actions n’octroie des options que si le prix de levée était supérieur à la JVM des actions :

[Traduction] Il est possible qu’aucun montant n’ait été inclus dans le revenu de l’entreprise au moment de l’octroi des options. En effet, il est possible que la JVM de ces options au moment de l’octroi ait été de zéro, compte tenu de la restriction imposée par le régime selon laquelle le prix de levée ne peut être inférieur à la JVM des actions ordinaires au moment de l’octroi[6].

Il peut y avoir un fait générateur d’impôt additionnel au moment où les options sont levées. L’ARC considère que, l’année de la levée, l’entrepreneur indépendant doit inclure dans son revenu la différence entre i) la JVM des actions au moment de leur acquisition et ii) la valeur combinée des deux éléments suivants : a) le prix de levée payé et b) la JVM de l’option incluse dans le revenu imposable de l’entreprise au moment de l’octroi[7]. La question de savoir si cet écart de valeur doit être comptabilisé comme un revenu d’entreprise ou un gain en capital est une question de fait[8]. Toutefois, l’ARC note que, si l’écart de valeur représente une partie de la contribution reçue pour des services rendus, elle doit être incluse dans le revenu imposable de l’entreprise, à moins qu’il puisse être démontré que l’entrepreneur indépendant détenait l’option à titre d’immobilisation[9]. L’ARC fait aussi une distinction ente les options octroyées pour des services rendus précédemment et les options octroyées pour des services à rendre. Dans le premier cas, à la levée de l’option, le paragraphe 49(3) s’applique afin que la levée de l’option soit réputée ne pas être une disposition de bien, et le coût de l’option est ajouté au prix de base rajusté des actions acquises[10].

On peut soutenir que, dans le cas où une portion des options ne sera acquise qu’à une date ultérieure, cette partie de la contrepartie est octroyée à l’entrepreneur indépendant pour des services non encore rendus. L’ARC note que, dans ces circonstances, elle peut considérer que la différence entre la JVM des actions et le prix de levée au moment de la levée, ou une portion de celui-ci, constitue une contrepartie reçue pour des services rendus et doit être incluse dans le revenu de l’entreprise[11]. Par contre, si les options expirent sans avoir été levées, l’entrepreneur indépendant peut demander une déduction pour le montant inclus dans son revenu précédemment[12].

En résumé, la LIR n’établit pas un ensemble complet de règles quant au traitement fiscal des options d’achat d’actions octroyées à des entrepreneurs indépendants. Ce traitement est plutôt déterminé par une série d’observations et d’interprétations techniques de l’ARC. L’ARC avertit que le traitement fiscal de ces options dépend des faits propres à chaque situation. En conséquence, bien que les indications ci-dessus fournissent une vue d’ensemble de l’application de la LIR, de la jurisprudence et des positions de l’ARC, une analyse approfondie s’impose pour que le traitement fiscal tienne compte des particularités de chaque cas.

Pour toute question, n’hésitez pas à communiquer avec un membre du groupe Fiscalité des entreprises de Miller Thomson.

[1] Paragraphe 7(5).

[2] Voir Avis de l’ARC (interprétation technique) 2000-0006935, « Stock options – employees and contracts ». Voir aussi Avis de l’ARC (interprétation technique) 1999-0013915 – « Stock options to independent contractors » et Avis de l’ARC (interprétation technique) 2003-0054581E5, « Stock option for independent contractors ».

[3] Voir Robertson c. Canada, [1990] 1 CCI 114 (Cour d’appel fédérale) et Lockwood Financial Ltd. c. La Reine, 2020 CCI 128.

[4] Voir Avis de l’ARC (interprétation technique) 1999-0013915, « Stock options to independent contractors ». Voir aussi IT-96R6 – Octroi d’options par une société en vue de l’acquisition d’actions, d’obligations ou de débentures et par une fiducie en vue de l’acquisition d’unités, paragr. 3.

[5] Voir Avis de l’ARC (interprétation technique) 2002-0151247, « Stock options issued to non-employees ».

[6] Voir Avis de l’ARC (interprétation technique) 2013-0513221I7-T, « Stock options », note 1.

[7] Voir Avis de l’ARC (interprétation technique) 1999-0013915, « Stock options to independent contractors ».

[8] Voir Avis de l’ARC (interprétation technique) 2000-0032675, « Stock options granted independent contractors ».

[9] Voir Avis de l’ARC (interprétation technique) 2003-0054581E5, « Stock option for independent contractors ». Voir aussi Avis de l’ARC 2004-0087041C6.

[10] Voir Avis de l’ARC (interprétation technique) 2002-0151247, « Stock options issued to non-employees ».

[11] Voir Avis de l’ARC (interprétation technique) 2002-0151247, « Stock options issued to non-employees ».

[12] Voir Avis de l’ARC (interprétation technique) 1999-0013915, « Stock options to independent contractors ».