La popularité grandissante des résidences de marque en Ontario témoigne d’un attrait croissant pour un style de vie mêlant art de vivre sophistiqué et services hôteliers haut de gamme. Toutefois, cette tendance s’accompagne d’enjeux juridiques et opérationnels de plus en plus complexes.

Dans la première partie de cette série en deux volets sur les résidences de marque, nous avons étudié les éléments fondamentaux que les promoteurs et les sociétés hôtelières doivent prendre en considération, notamment la structure du projet, les documents constitutifs et les contrats de vente de biens d’habitation et les documents de marketing.

Dans cette deuxième partie, nous poursuivons l’étude de trois autres aspects tout aussi essentiels, c’est-à-dire les contrats de services techniques, les contrats de lancement, les contrats de gestion résidentielle et les conventions d’installations partagées. Ces facteurs jouent un rôle central dans le respect des normes liées à la marque, à la conformité réglementaire et à l’équilibre des relations à long terme entre opérateurs hôteliers, promoteurs et propriétaires.

4. Le contrat de services techniques et le contrat de lancement

En phase de pré-lancement, un contrat de services techniques (« CST ») peut être conclu dans le but de définir les exigences de conception du projet hôtelier et résidentiel de marque et de baliser les procédures d’approbation des plans et du cahier des charges.

Le CST permet généralement de préciser l’esthétique de la marque, les finitions et le mobilier, ainsi que les normes à respecter.  Dans certains projets, une suite modèle est aménagée pour assurer le respect des normes liées à la marque. La société hôtelière reçoit alors en échange des honoraires de conception, calculés au forfait, à l’unité ou selon un mode de calcul mixte.

De plus, elle peut offrir des services de lancement, soit dans le cadre du CST, soit au titre d’une entente distincte. Le contrat de lancement encadre les étapes fondamentales de préparation de l’immeuble, allant des travaux de construction à la planification budgétaire, en passant par la formation et l’obtention des permis et licences réglementaires. La marque ou la société hôtelière dispose généralement du pouvoir de définir les conditions à respecter dans le cadre des deux contrats, pour que l’immeuble demeure conforme aux normes liées à la marque.

5. Le contrat de gestion résidentielle

Le contrat de gestion résidentielle établit les règles et les responsabilités applicables à la gestion de l’immeuble et au processus budgétaire. Toutefois, au moment de la rédaction de ce contrat, les promoteurs et les sociétés hôtelières doivent également tenir compte des aspects juridiques locaux prévus dans les lois et les règlements régissant la gestion des condominiums.

En Ontario, la Loi de 2015 sur les services de gestion des condominiums (la « Loi ») prévoit que toute association condominiale doit être gérée par un gestionnaire agréé. Cette disposition vise non seulement la composante résidentielle du condominium, mais également la gestion de toute installation partagée relevant de l’association condominiale.

Le gestionnaire et le fournisseur de services de gestion doivent tous deux être agréés par l’Office ontarien de réglementation de la gestion des condominiums (OORGC). Lorsque la composante hôtelière est détenue en pleine propriété (ou ne constitue pas une association condominiale), la Loi ne s’applique pas à la gestion de l’hôtel, mais demeure applicable à toute installation partagée dont l’hôtel assure la gestion.

L’article 111 de la Loi de 1998 sur les condominiums de l’Ontario donne au conseil d’administration d’une association condominiale le droit de résilier tout contrat de gestion conclu avec une personne avant que les propriétaires n’élisent un nouveau conseil d’administration, moyennant l’envoi par écrit d’un préavis de soixante jours. Cela signifie que les sociétés hôtelières doivent garder à l’esprit qu’un conseil nouvellement élu au sein de l’association condominiale pourrait être en droit de mettre fin au contrat de gestion. Cela dit, les promoteurs insèrent fréquemment dans la déclaration des clauses obligeant l’association condominiale à respecter et à céder le contrat de gestion.

La question du règlement des frais pour mettre fin à un contrat conclu par le promoteur, puis résilié par le premier conseil d’administration, est entourée d’une certaine incertitude. L’actuelle Loi de 1998 sur les condominiums ne prévoit aucune disposition concernant le paiement de ces frais, même s’il est tout à fait légal de mettre fin au contrat.

Selon les amendements proposés, aucune responsabilité ne pourra être imposée à l’association condominiale si elle résilie ces contrats conformément aux modalités prévues, même en présence de clauses prévoyant des frais de résiliation ou d’annulation. À défaut d’entrée en vigueur d’ici la fin de 2025, ces propositions d’amendement deviendront caduques.

La plupart des contrats de gestion hôtelière prévoient que la société hôtelière peut y mettre fin si le contrat de gestion résidentielle est résilié, indépendamment du droit de résiliation dont dispose l’association condominiale.

6. La convention d’installations partagées

Pour les propriétaires de condominiums, l’intérêt pour les résidences de marque repose en partie sur l’accès à des services dignes des grands hôtels comme le service aux chambres, l’accès à la piscine et d’autres services de luxe. Une convention d’installations partagées est généralement mise en place pour faciliter l’accès de ces services et permettre aux résidents d’en bénéficier moyennant des frais (ce sujet a été abordé dans la première partie).

En vertu de l’article 113 de la Loi de 1998 sur les condominiums, une association condominiale est autorisée à demander une ordonnance du tribunal afin de modifier ou de résilier une convention d’utilisation en commun dans les douze mois qui suivent la réunion de transfert des pouvoirs, si les conditions suivantes se présentent :

  • l’état de divulgation n’a pas divulgué « clairement et adéquatement » les dispositions de la convention;
  • la convention ou l’une ou l’autre de ses dispositions entraîne un « abus ou cause un préjudice injuste ».

La Cour supérieure de justice de l’Ontario a précisé le sens de l’expression « clairement et adéquatement » dans l’affaire TSCC 2130 c. York Bremner Developments Limited. Un déclarant peut imposer une convention d’utilisation en commun injuste ou unilatérale s’il porte ces dispositions à l’attention des acheteurs et explique les risques de résultats oppressifs ou déraisonnablement préjudiciables dans la divulgation. Toutefois, cette mesure n’est pas suffisante. En effet, le déclarant doit fournir suffisamment d’informations pour que [TRADUCTION] « l’acheteur puisse voir (clairement) et comprendre (adéquatement) les dispositions susceptibles d’entraîner un risque d’oppression ou de préjudice injustifié ». Cela dit, il n’est pas tenu de divulguer toutes les conséquences pouvant causer un risque d’oppression, qu’elles soient anticipées ou non, mais seulement celles qui sont raisonnablement prévisibles ou connues au moment de la divulgation.

La réalisation d’un projet de résidence de marque s’accompagne de plusieurs autres considérations et ententes à négocier avec soin. Cet article, présenté en deux parties, offre un cadre de réflexion adapté au marché ontarien, sans pour autant prétendre en traiter tous les aspects.

Même dans un contexte économique marqué par l’incertitude, les tendances récentes laissent entrevoir un intérêt en hausse pour les résidences de marque au Canada et dans le monde. Pour en apprendre davantage sur le soutien que nous pouvons vous apporter dans le cadre de votre projet de résidence de marque, communiquez avec un membre du groupe Copropriétés de Miller Thomson.