« Si l’on sait qu’un groupe de personnes a le pouvoir de faire quelque chose, il est naturel de penser que chacun des membres du groupe, dans une certaine mesure du moins, a le pouvoir de le faire. » C’est ce qu’affirme le philosophe moraliste Peter French dans Responsibility Matters (University Press of Kansas, 1992), et ce principe semble s’appliquer dans les immeubles en copropriété : de nombreux propriétaires de parties privatives pensent que, puisque le conseil d’administration a le pouvoir d’administrer l’immeuble en copropriété, d’accorder les autorisations nécessaires, de prendre des décisions et d’exercer ses fonctions, chaque membre du conseil détient également ce pouvoir. C’est peut-être vrai à certains endroits, mais pas en Ontario.
Ce que dit la loi en Ontario
En Ontario, la loi stipule ce qui suit :[1]
- « Dès l’enregistrement de la déclaration et de la description […] une association condominiale est constituée. »
- « L’association a pour mission de gérer la propriété et les biens, le cas échéant, de l’association au nom des propriétaires. »
- « L’association a le devoir de contrôler, de gérer et d’administrer les parties communes et les biens de l’association » et « […] de prendre toutes les mesures raisonnables pour faire en sorte que les propriétaires […] se conforment à la présente loi, à la déclaration, aux règlements administratifs et aux règles. »
- « Un conseil d’administration gère les affaires de l’association. » et
- « […], le conseil de l’association ne peut conduire les affaires de celle-ci qu’à une réunion des administrateurs à laquelle il y a quorum. »
Aucun pouvoir sans conseil d’administration
Ce que ces dispositions signifient, en ce qui concerne le pouvoir des administrateurs individuels, c’est qu’individuellement, ces derniers n’ont aucun pouvoir. Les membres du conseil d’administration d’une association condominiale ne peuvent prendre des décisions concernant cette dernière que lorsqu’ils agissent ensemble, pendant une réunion du conseil dûment convoquée et constituée.
Concrètement, c’est sur ce fondement que repose le conseil fréquemment donné aux propriétaires de parties privatives : ils ne doivent ni se fier aux paroles des administrateurs individuels ni tenter de les aborder ou de les importuner à propos d’une décision ou d’une approbation en dehors des réunions du conseil d’administration. Demander à un administrateur dans le stationnement s’il est possible de construire un jardin, d’installer un spa, d’utiliser le stationnement des visiteurs, de réserver la salle de fête ou de retarder le paiement des dépenses communes, par exemple, n’est ni efficace ni approprié. Les propriétaires de parties privatives doivent avoir la discipline et la sagesse pratique d’adresser leurs demandes à l’ensemble du conseil d’administration et de tenter d’influencer uniquement l’ensemble du conseil, généralement par écrit ou par tout autre moyen établi par le conseil d’administration, qui est l’ultime gestionnaire de l’association.
Le problème des administrateurs qui outrepassent leur mandat
Cela dit, dans bien des cas, le principal problème ne réside pas dans la méconnaissance, par les propriétaires de parties privatives, du pouvoir que les administrateurs exercent avec autorité. Il réside plutôt dans le fait que les membres du conseil d’administration, sous prétexte qu’ils ont réussi à se faire élire ou nommer à ce poste au sein de leur communauté, pensent d’une certaine manière qu’ils possèdent un pouvoir particulier, qu’ils sont supérieurs aux autres propriétaires de parties privatives et qu’ils ont le droit d’exercer un contrôle sur eux sans l’examen, la prise en compte, la coopération et l’autorisation des autres membres du conseil d’administration. La conduite de ces administrateurs est non seulement inappropriée, mais également illégale, du moins en Ontario.
Lorsqu’un administrateur d’une association condominiale démontre une telle méconnaissance de son rôle, il peut être utile de lui rappeler que son élection lui confère une position de responsabilité et non une position d’autorité. Cette responsabilité comprend notamment l’obligation de soumettre ses intentions individuelles et ses objectifs au pouvoir décisionnel collectif de l’ensemble du conseil et de mettre son orgueil de côté.
L’auteur Robert Jordan a déjà dit : « On ne peut jamais tout savoir, et une partie de ce que l’on sait est toujours inexacte. » Un administrateur d’une association condominiale qui agit avec honnêteté et de bonne foi, conformément à l’article 37(1) de la Loi de 1998 sur les condominiums, garde toujours ce principe à l’esprit et s’efforce de privilégier le consensus et la coopération plutôt que le contrôle.
Principaux points à retenir
- Les associations condominiales en Ontario sont des personnes morales régies collectivement par un conseil d’administration, non par ses membres agissant individuellement.
- Les administrateurs individuels n’ont aucun pouvoir de prendre des décisions ou d’approuver des demandes en dehors des réunions du conseil dûment constituées auxquelles il y a quorum.
- Les propriétaires de parties privatives doivent soumettre leurs demandes, se rapportant, par exemple, à des modifications, commodités ou ajustements de frais, à l’ensemble du conseil, selon les modes de communication établis.
- Les membres du conseil d’administration doivent agir dans l’exercice de leur responsabilité, et non de leur pouvoir personnel. Leur rôle exige la collaboration, le respect des procédures et la responsabilité à l’égard de l’association et de ses documents constitutifs.
- L’abus du pouvoir individuel perçu par les administrateurs est non seulement inapproprié, mais aussi illégal en vertu de la législation ontarienne sur les immeubles en copropriété.
En tant que membre du conseil d’administration d’une association condominiale, il est essentiel de comprendre le cadre de gouvernance à la base d’une saine communauté condominiale. Tenez-vous au courant, respectez les canaux de communication appropriés et, surtout, préservez l’esprit de prise de décision collective.
Pour ce faire, les administrateurs doivent faire preuve d’humilité et d’intégrité et respecter la loi. Ensemble, ces pratiques contribuent à protéger vos droits, à préserver l’harmonie communautaire et à faire en sorte que l’association soit gérée efficacement et en toute légalité.
Si vous avez des questions sur vos droits et responsabilités en tant que membre du conseil d’administration, n’hésitez pas à communiquer avec notre groupe Copropriété.
[1] Loi de 1998 sur les condominiums, articles 2(3)(c), 17(1), 17(2), 17(3), 27(1) et 32(1).