L’usage commercial des drones s’intensifie au Canada, que ce soit pour l’inspection d’infrastructures ou pour des interventions d’urgence. Par conséquent, le paysage réglementaire doit s’adapter pour suivre cette progression.

Le 26 mars 2025, le gouvernement fédéral a publié plusieurs amendements importants (les « amendements ») apportés au Règlement de l’aviation canadien concernant les opérations au-delà de la visibilité directe (« BVLOS »).

Ces modifications ouvrent la voie à des opérations de drones plus complexes et d’une plus grande autonomie dans l’espace aérien canadien. Certaines dispositions sont entrées en vigueur le 1er avril 2025. Toutefois, la plupart des nouvelles règles prendront effet à compter du 4 novembre 2025.

L’essor du pilotage des drones au Canada : de l’usage récréatif au secteur professionnel

En forte progression au Canada, le pilotage de drones devrait passer de 22,5 milliards $ US en 2020 à 54,6 milliards $ US en 2030, et une croissance fulgurante est anticipée sur le marché mondial au cours des prochaines années. Au Canada, le pilotage de drones ne se limite plus aux activités récréatives. En effet, les opérations par drones ont augmenté dans certains secteurs, notamment pour l’inspection d’infrastructures, l’agriculture, la réalisation de films, l’observation des milieux naturels et même les interventions d’urgence, y compris la livraison de colis dans certaines régions éloignées.

En 2019, le gouvernement fédéral a adopté la partie IX du Règlement de l’aviation canadien (le « RAC») à des fins d’encadrement du pilotage des petits drones de moins de 25 kg, qui effectuent des opérations avec une visibilité directe (« VLOS »). Toutefois, face aux avancées technologiques et à la multiplication des usages commerciaux, la nécessité d’une adaptation du cadre réglementaire s’est imposée.

Les récents amendements visent précisément à combler ce besoin en tenant compte des objectifs suivants :

  • Cadre réglementaire plus prévisible pour stimuler l’innovation et la croissance économique;
  • Amélioration des mécanismes de surveillance en matière de sécurité et réduction des risques;
  • Structure tarifaire modernisée, en phase avec les attentes du secteur.

Nouvelle catégorie d’aéronefs télépilotés (SATP)

Dans le cadre réglementaire actuel, les exploitants d’aéronefs pour des opérations au-delà de la visibilité directe et d’aéronefs télépilotés de taille moyenne de plus de 25 kg doivent d’abord obtenir un Certificat d’opérations aériennes spécialisées (le « COAS ») pour pouvoir effectuer des opérations de cette nature. Ce certificat est accordé au cas par cas, ce qui prend souvent beaucoup de temps et représente une lourde charge administrative pour l’ensemble des parties concernées. Avec les avancées technologiques, les drones sont utilisés pour des opérations plus complexes, ce qui a entraîné une importante augmentation des demandes de COAS. Selon les parties concernées au sein de ce secteur, l’absence de réglementation claire concernant les BVLOS et les aéronefs télépilotés de taille moyenne est un obstacle à la croissance économique et à l’innovation dans le secteur des drones au Canada.

Les amendements créent une nouvelle catégorie pour les BVLOS de taille moyenne, qui comprend notamment les drones pesant entre 25 kg et 150 kg. Les opérateurs qualifiés seront autorisés à effectuer des opérations en BVLOS à l’aide de drones de taille moyenne dans les limites des VLOS et à effectuer des opérations en BVLOS de routine au-dessus de zones peu peuplées, à basse altitude et dans un espace aérien non contrôlé, sans avoir besoin d’un COAS. Pour ces opérations, les amendements remplacent les COAS par de nouvelles certifications de pilote et d’opérateur plus structurées, adaptées au degré de complexité et de risque liés aux opérations projetées.

Réduction des risques liés à la sécurité

Pour répondre aux risques de sécurité posés par des opérations en BVLOS de plus grande envergure et complexité, les amendements imposent de nouvelles exigences de sécurité concernant ce qui suit :

  • Le pilote (p. ex., la formation et la certification);
  • Le produit (p. ex., l’aéronef et les systèmes connexes);
  • Les procédures (p. ex., les règles de fonctionnement).

Élargissement des privilèges associés au certificat de pilote – opérations avancées

Les amendements élargissent également les privilèges accordés aux titulaires d’un certificat de pilote pour opérations avancées. Dans le cadre du nouveau régime, les titulaires de certificats sont autorisés à effectuer des opérations protégées, c’est-à-dire des vols à proximité de structures tout en respectant des restrictions d’altitude et de distance, ainsi que des opérations en VLOS prolongée (« EVLOS »). Les EVLOS, qui ne sont pas explicitement reconnus dans les règles actuelles, serviront de nouvelle catégorie intermédiaire entre le VLOS et le BVLOS, et permettront aux drones de voler au-delà de la visibilité directe du pilote, mais dans un rayon de 2 milles nautiques (3,6 km) avec l’aide d’un observateur visuel dûment formé. De plus, les pilotes disposant d’un certificat pour opérations avancées seront autorisés à utiliser des SATP de taille moyenne en visibilité directe, sous certaines conditions préétablies.

Nouveau certificat pour les opérations en BVLOS à faible risque

Les amendements prévoient un nouveau processus de certification des pilotes pour les opérations en BVLOS à faible risque, appelées opérations complexes de niveau 1. Pour obtenir cette certification, les pilotes doivent avoir au moins 18 ans, réussir l’examen en ligne pour les opérations avancées, prévu à la partie IX du RAC, suivre au moins 20 heures de formation au sol et réussir une révision en vol. La certification pour les opérations complexes de niveau 1 n’expirera pas, mais les pilotes devront suivre au moins une activité de renouvellement de la formation reconnue par Transports Canada tous les deux ans. À compter du 1er avril 2025, les candidats peuvent commencer à passer l’examen et présenter une demande de certificat d’exploitant de SATP (CES) (décrit ci-dessous).

Demandes de déclaration validée au préalable

Les procédures de demande de déclaration validée au préalable s’ajoutent à celles auxquelles les constructeurs de SATP doivent se conformer. Dans le cadre de ces nouvelles procédures, les exploitants de SATP doivent présenter un plan exposant de quelle manière ils entendent respecter les exigences de Transports Canada dans la conception de leur aéronef. Les vols de drones ne seront autorisés que si le fabricant a obtenu les autorisations après présentation d’une demande de déclaration ou de déclaration validée au préalable.

Exigences de fonctionnement et certificat d’exploitant de SATP (CES)

Les amendements précisent également les exigences relatives aux opérations en BVLOS à faible risque. Ces opérations sont limitées à l’espace aérien non contrôlé; elles doivent être effectuées à moins de 122 mètres (400 pieds) au-dessus du sol et à une distance d’au moins un kilomètre d’une zone peuplée. De plus, les pilotes effectuant des opérations en BVLOS à faible risque devront déterminer à l’avance la densité de la population au sol dans leur zone d’opération, selon un cadre de ressources prescrites.

Dans le cadre de ce nouveau régime, les organisations et les entreprises qui effectuent des opérations en BVLOS sont également tenues d’obtenir un certificat d’exploitant de SATP (« CES »), attestant qu’elles disposent des politiques et procédures nécessaires selon l’envergure et la complexité de leurs opérations. Depuis le 1er avril 2025, les demandes de CES peuvent être déposées sur le Portail de gestion des drones de Transports Canada, tandis que la majorité des autres amendements mentionnés dans cet article prendront effet le 4 novembre 2025.

Exigences de propriété canadienne

Les amendements précisent également que l’exploitation d’un service aérien commercial au Canada à l’aide d’un SATP est réservée aux personnes suivantes :

  • Un citoyen canadien ou un résident permanent;
  • Toute administration publique du Canada;
  • Une personne morale ou une entité constituée ou formée au Canada et contrôlée de fait par des Canadiens et dont au moins 75 % des intérêts avec droit de vote sont détenus et contrôlés par des Canadiens.

Si un drone transporte du fret, l’exploitant continuera d’être dans l’obligation de demander un permis d’exploitation commerciale auprès de l’Office des transports du Canada. Les exploitants étrangers titulaires d’un COAS peuvent offrir des services aériens spécialisés à condition qu’ils proviennent de pays avec lesquels le Canada a conclu un accord commercial ou qu’ils aient obtenu une exemption pour cela.

Modernisation des frais

Les amendements permettent d’instaurer de nouveaux services et frais pour soutenir le cadre élargi des SATP, notamment des frais pour la délivrance des COAS, ainsi que pour les nouveaux services, comme les fonctions d’examen et de certification, qui appuient les opérations en visibilité directe et au-delà de la visibilité directe.

Prochaines étapes

Ces amendements visent ultimement à assurer une meilleure intégration des SATP dans l’espace aérien canadien et à instaurer un cadre réglementaire plus rigoureux auquel tous les acteurs du secteur des SATP doivent se conformer. Les exploitants de drones, qu’ils soient des entreprises ou des particuliers, sont appelés à vérifier si les nouvelles dispositions du règlement auront une incidence sur leurs opérations et à s’assurer du maintien de leur conformité.

Si vous avez des questions concernant les amendements au règlement sur les drones au Canada, veuillez communiquer avec un membre de l’équipe Transports et logistique de Miller Thomson.