Le 1er février 2024, le ministre du Travail, Jean Boulet, a présenté le projet de loi no 51, Loi modernisant l’industrie de la construction. Appelé à réformer, à moderniser et à rendre plus efficace l’industrie de la construction, ce projet de loi en est à l’étape des consultations et des amendements. Que devons-nous retenir de ce projet de loi avant son adoption?

Ce projet de loi est déposé au moment où l’industrie de la construction, comme bien des secteurs de l’économie québécoise, fait face à une pénurie de main-d’œuvre. Le projet de loi tente principalement de revoir l’organisation du travail au sein de l’industrie de la construction.

De plus, l’industrie de la construction subit actuellement une forte pression puisqu’elle doit répondre à l’importante crise du logement à laquelle est confronté le Québec dans son ensemble, notamment à Montréal.

Ce projet de loi fait suite aux annonces gouvernementales de l’automne dernier concernant la formation de près de 5 000 employés supplémentaires dans des corps de métier recherchés. Le gouvernement avait annoncé vouloir offrir de nouvelles formations de courte durée en charpenterie-menuiserie, conduite d’engins de chantier, ferblanterie et réfrigération, ainsi que des formations menant à un diplôme d’études professionnelles (DEP) en électricité et en plomberie-chauffage.

Le Gouvernement du Québec annonçait, au moment du dépôt du projet de loi 51, les principaux objectifs de celui-ci, parmi lesquels on retrouve notamment :

  • Favoriser une meilleure organisation du travail en permettant une plus grande mobilité de la main-d’œuvre sur le territoire québécois, tout en conservant une priorité d’embauche régionale;
  • Faciliter l’accès à l’industrie de la construction et l’inclusion des groupes représentatifs, notamment les femmes, les membres des Premières Nations, les Inuits ainsi que les personnes issues de l’immigration;
  • Optimiser le régime de négociation des conventions collectives, notamment en modifiant la séquence et les périodes allouées au maraudage et à la préparation des négociations, ainsi qu’en améliorant les mécanismes de médiation et de plainte, le tout afin de favoriser le règlement harmonieux des négociations;
  • Permettre la négociation d’une rétroactivité des augmentations salariales et mettre en place un nouveau fonds à la Commission de la construction du Québec pour le versement de celle-ci.

Si l’accueil réservé au projet de loi semble plutôt bon dans l’industrie, un point de discorde pourrait survenir quant au sort des travailleurs en région. Bien que la plupart des représentants patronaux estiment que le nouveau projet de loi permettra de combler les besoins de main-d’œuvre en région, les principaux syndicats se désolent quant à eux des effets que pourrait avoir le projet de loi sur la priorité régionale à l’embauche.

Par exemple, l’Association de la construction du Québec estime quant à elle que « dans un contexte où la productivité est essentielle pour répondre aux défis de la pénurie de main-d’œuvre et réaliser efficacement les projets de construction dans toutes les régions du Québec, l’ACQ reconnaît l’importance capitale des actions entreprises[1]. »

À l’inverse, « la CSD Construction constate que le gouvernement a répondu à une demande patronale majeure en interdisant de négocier de bonne foi des clauses sur la mobilité de main-d’œuvre[2]. »

Le défi est grand pour une industrie appelée à en réaliser beaucoup, le tout dans un contexte de rareté de main-d’œuvre, d’inflation et de défis quant à la rétention des employés. Le gouvernement tente de trouver des solutions pour faire face à ces problèmes, reste à voir les impacts concrets que celles-ci auront.

La plupart des associations et des syndicats de la construction ont pu livrer leur point de vue sur la question en commission parlementaire au cours du mois de mars.

À présent, le projet de loi en est à l’étape de l’étude détaillée en commission. Au cours de cette étape, les parlementaires, tant du gouvernement que des oppositions, auront l’occasion de proposer des amendements, eu égard aux commentaires reçus des différents intervenants au cours des dernières semaines.

Par la suite, la Commission de l’économie et du travail, chargée d’évaluer le projet de loi, produira son rapport final qui devra être adopté par l’Assemblée nationale du Québec là où siègent les 125 députés. Ultimement, le projet de loi sera soumis à un vote pour être adopté.

Nous en sommes donc dans la dernière ligne droite du projet de loi. Il sera intéressant de voir la version définitive qui sera adoptée, ainsi que les effets de celle-ci sur l’industrie.


[1] Communiqué de l’association de la construction du Québec daté du 1er février 2024.

[2] Communiqué de la CSD Construction daté du 2 février 2024.