Des bâtiments carboneutres au Québec, en un temps record

6 décembre 2022 | Adina Georgescu

(Remerciements à Feriel Fatiha Djemame)

Le 7 avril 2016, le gouvernement du Québec (le « gouvernement ») a dévoilé sa Politique énergétique 2030 (la « Politique »)[1] confirmant l’objectif du Québec de devenir un chef de file en Amérique du Nord en matière d’efficacité énergétique et d’énergies renouvelables d’ici 2030. Par la suite, le 16 novembre 2020, le gouvernement a procédé au lancement de son Plan pour une économie verte 2030[2] (le « Plan »), dont l’objectif consiste à favoriser en priorité les mesures d’électrification à plus grande échelle et le développement du secteur des bioénergies.

I. La Politique énergétique 2030 et sa mise en œuvre

La Politique définit la stratégie de transition énergétique du Québec jusqu’en 2030. Elle vise notamment à privilégier une économie faible en carbone, à mettre en valeur de façon optimale les ressources énergétiques du Québec et à tirer pleinement parti du potentiel de l’efficacité énergétique.

Pour atteindre ces objectifs, le gouvernement s’est fixé cinq cibles à atteindre d’ici 2030, incluant augmenter de 25 % la production totale d’énergies renouvelables et augmenter de 50 % la production de bioénergie. Pour atteindre ces cibles, la Politique prévoit la modification du cadre juridique québécois[3] et l’adoption de quatre plans d’action parmi lesquels figure le Plan.

II. Le Plan pour une économie verte 2030

Le Plan vise la réduction, d’ici 2030, des émissions de gaz à effet de serre (« GES ») de 37,5 % par rapport au niveau de 1990, notamment par la mise en œuvre de mesures comme l’augmentation de l’électrification des transports et des bâtiments, la réduction de l’attribution gratuite de droits d’émission au secteur industriel et une plus grande utilisation d’autres formes d’énergie provenant de sources renouvelables[4].

L’un des objectifs du gouvernement consiste à réduire les émissions de GES découlant du chauffage des bâtiments en accélérant le remplacement de l’approvisionnement énergétique constitué de combustibles fossiles par l’électricité[5]. Le gouvernement entend également accorder priorité aux énergies renouvelables et à l’utilisation de matériaux à faible teneur en carbone dans les secteurs de la construction de bâtiments neufs ou de la rénovation de bâtiments existants[6].

III. Nouvelles obligations en matière de transition énergétique pour les propriétaires de bâtiments

C’est dans ce contexte qu’en décembre 2020, la Ville de Montréal a adopté son Plan climat 2020-2030[7] (le « Plan climat »), qui vise l’atteinte de la carboneutralité d’ici 2050. Le plan de la Ville prévoit la mise en œuvre de 46 actions pour réduire les émissions de GES dans la région métropolitaine[8], dont la mise en œuvre de mesures visant à atteindre zéro émissions de carbone dans le parc immobilier municipal, un secteur qui représente actuellement près de 30 % du total des émissions de GES et qui se classe au deuxième rang sur le plan des émissions de la Ville après le secteur des transports[9]. Plus précisément, le Plan climat prévoit bannir l’utilisation des combustibles fossiles dans tous les immeubles municipaux afin de les alimenter uniquement en énergies renouvelables d’ici 2030[10].

Le respect de cette cible devait mettre la Ville sur le chemin de la carboneutralité d’ici 2050. Toutefois, l’administration municipale actuelle annonçait en mai dernier qu’elle avait devancé cette échéance de dix ans grâce à sa Feuille de route vers des bâtiments montréalais zéro émission dès 2040[11] (la « Feuille de route »). Ce document jette les bases de la décarbonation de l’ensemble des bâtiments situés sur le territoire de la Ville, publics et privés (commerciaux, résidentiels et institutionnels), d’ici 2040[12].

La Feuille de route se divise en deux étapes : la première concerne les nouveaux bâtiments alors que la seconde port sur les bâtiments déjà existants[13]. Pour le nouveau parc immobilier, la feuille de route prévoit l’adoption, d’ici 2023, d’un nouveau règlement imposant un seuil de performance obligatoire de zéro émissions de GES en vue de l’obtention de nouveaux permis de construction[14]. Quant au parc immobilier existant, la Ville prévoit d’imposer des seuils de performance progressifs de réduction des GES afin que le parc immobilier dans son ensemble puisse être complètement alimenté au moyen d’énergies renouvelables d’ici 2040.

Ces nouvelles obligations s’ajoutent au Règlement sur la divulgation et la cotation des émissions de gaz à effet de serre des grands bâtiments (21-042) adopté en 2021 et déjà entré en vigueur, qui oblige les propriétaires de grands bâtiments à divulguer chaque année les émissions de gaz à effet de serre générées par la consommation énergétique de leur bâtiment afin de permettre à la Ville de développer des mesures visant à les réduire[15].

La Ville de Gatineau, en Outaouais, a emboîté le pas en adoptant son propre plan climat pour la réduction de ses émissions de GES. La Ville voisine de Chelsea a également indiqué sa volonté de réduire ses émissions de GES en misant sur des projets d’énergie géothermique à grande échelle[16].

De la même manière, la Ville de Sherbrooke prévoit adopter dans les prochains mois un plan climat afin de respecter son objectif de réduction de ses émissions de 30% d’ici 2030, par rapport au niveau de 2009[17]. La Ville de Sherbrooke a également l’intention de traiter la question des émissions de GES résultant du chauffage des bâtiments[18].

Nous constatons une volonté manifeste des villes et municipalités du Québec de s’engager très concrètement dans la lutte contre les changements climatiques. D’autres villes et municipalités de la province s’apprêtent à adopter des plans climat et à imposer de nouvelles obligations aux propriétaires de bâtiments dans le but de réduire les émissions de GES. Ces mesures auront des répercussions financières et administratives directes sur les propriétaires de bâtiments, qui devront se conformer à de nouvelles normes et exigences à l’intérieur de délais relativement restreints.

[1] Politique énergétique 2030 : L’énergie des Québécois – Source de croissance, ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles, gouvernement du Québec,

[2] Plan pour une économie verte 2030, gouvernement du Québec, (Politique-cadre d’électrification et de lutte contre les changements climatiques).

[3] Voir, par exemple : Loi concernant la mise en œuvre de la Politique énergétique 2030 et modifiant diverses dispositions législatives, LQ 2016, chapitre 35; Loi sur les hydrocarbures, CQLR, chapitre H-4.2; Loi visant principalement la gouvernance efficace de la lutte contre les changements climatiques et à favoriser l’électrification, LQ 2020, chapitre 19.

[4] Supra, note 2.

[5] Le Plan, p. 53 et 54.

[6] Le Plan, p. 53 et 54.

[7] Plan climat 2020-2030, Ville de Montréal.

[8] Id.

[9] Plan climat 2020-2030 – Première reddition de compte annuelle (Ville de Montréal)

[10] Plan climat, p 89.

[11] La Ville accélère le pas de la transition écologique et annonce sa feuille de route vers des bâtiments montréalais zéro émission dès 2040, p 1.

[12] Feuille de route, p 2.

[13] Feuille de route, p 2.

[14] Feuille de route, p 2.

[15] Règlement 21-042 de la Ville de Montréal, article 1.

[16] Plan d’action en développement durable 2018-2021 – Municipalité de Chelsea, p 26.

[17] Ville de Sherbrooke – Plan climat,

[18] Ville de Sherbrooke – Plan climat,

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