Dans le cadre de procédures judiciaires, l’importance d’agir en temps opportun est essentielle. Ce principe s’accentue lorsqu’il est question d’une demande visant à obtenir une injonction provisoire, tel que réaffirmé récemment par la Cour supérieure dans l’affaire Ville de Baie-d’Urfé c. Hirtle [1].

La demanderesse, la Ville de Baie-d’Urfé (la « Ville »), intente une injonction provisoire visant à interrompre les travaux de construction entrepris par la défenderesse. La Ville allègue que les travaux enfreignent la réglementation municipale qui exige l’obtention d’un permis de construction pour ce type de travaux.

D’après les faits, le 8 juillet 2020, une technicienne au service de l’urbanisme de la Ville procède à l’inspection de la résidence. Lors de cette visite, elle note que des travaux sont en cours alors que la Ville n’avait pas délivré de permis. Le 27 juillet 2020, la Ville, alléguant avoir reçu des plaintes au sujet des travaux effectués par la défenderesse, envoie un avis à cette dernière lui demandant de contacter le service d’urbanisme dans les cinq prochains jours afin d’entamer la procédure nécessaire pour l’obtention d’un permis. Dans sa lettre, la Ville ordonne à la défenderesse de cesser tous les travaux en cours et, à défaut de respecter cet avis, la défenderesse s’expose à des amendes ou des procédures judiciaires. Le 2 septembre 2020, la Ville envoie une deuxième lettre à la défenderesse réitérant les faits ci-haut et, qu’en date du 1er septembre 2020, des travaux étaient toujours en cours. Ainsi, la défenderesse est mise en demeure de soumettre une demande de permis et de communiquer tout autre document requis dans les dix jours suivant réception de la lettre. La preuve démontre que cette mise en demeure a été reçue par la défenderesse le 8 septembre 2020. À défaut d’obtempérer à ces exigences, la Ville affirme qu’elle intentera toutes les procédures nécessaires afin de s’assurer de la conformité avec la réglementation applicable.

Le 16 septembre 2020, nonobstant le fait que le délai de 10 jours n’est pas encore expiré, la Ville intente une demande d’injonction provisoire visant à interrompre les travaux. La Cour supérieure, sous la plume de l’honorable Babak Barin, j.c.s., est d’avis qu’« en soi, ce seul fait, sans prendre en considération les autres critères de l’injonction provisoire recherchée, est fatal pour la Ville. » [2] En outre, bien que la Ville soit informée depuis juillet 2020 que des travaux étaient en cours, ce n’est qu’au mois de septembre qu’elle décide de saisir les tribunaux. Ainsi, la Cour est d’avis que la Ville « ne peut aujourd’hui se plaindre de ses propres décisions. » [3] En dernier lieu, lors de l’audience, le procureur de la Ville concède que, nonobstant le fait que la présente demande échoue et que les travaux de la défenderesse aient été exécutés, la Ville ne sera pas dépourvue de tout recours. À la lumière de ce qui précède, la Cour conclut que la demande introductive d’instance en injonction provisoire doit être rejetée étant donné l’absence de toute urgence et la preuve d’un préjudice sérieux ou irréparable.

[1] Ville de Baie-d’Urfé c. Hirtle, 2020 QCCS 2975

[2] Ville de Baie-d’Urfé c. Hirtle, supra, paragr. 19

[3] Ville de Baie-d’Urfé c. Hirtle, supra, paragr. 22