Quand les bons plans tournent mal…

31 mai 2012

La décision Botham Holdings Ltd. (Trustee of) c. Braydon Investments Ltd.1 de la Colombie-Britannique
est un rappel que les planifications fiscales et successorales devraient
prendre en considération les impacts non fiscaux et légaux. Il peut être extrêmement
dangereux de laisser la planification fiscale mener le bal!

M. Botham et une fiducie familiale étaient actionnaires de Botham
Holdings Ltd. (« Holdings »). En 2004, Holdings fut assez chanceux
pour réaliser un large gain en capital et, par conséquent, devait payer un
important montant d’impôt.

En 2005, Holdings a fondé une société de personnes pour
acquérir le portfolio d’une entreprise en déclin faisant la location
d’automobiles. Holdings voulait prendre avantage d’une déduction fiscale
substantielle disponible pour la nouvelle entreprise et ainsi appliquer cette déduction
à l’encontre de l’impôt à payer pour l’année fiscale 2004. Ces déductions
seraient cependant disponibles seulement si Holdings était l’associé majoritaire
et au surplus responsable pour les dettes de la société. La société a commencé
ses opérations le 1er septembre 2005 avec Holdings comme associé.

Holdings a entrepris des démarches pour limiter les risques
sur les autres actifs substantiels de la société. Le 31 octobre 2005, Holdings,
par l’entremise d’une série de transactions complexes, a transféré ses autres
actifs à une compagnie sœur. Ceci fut accompli par voie d’une réorganisation « papillon »
dans le but d’effectuer le transfert des actifs sur une base non-imposable. Au
moment de la transaction « papillon », il n’y avait pas de
réclamations des créanciers contre Holdings et aucun créancier ne s’était fié
sur les actifs de Holdings avant de faire affaire avec la société.

Malheureusement, la nouvelle entreprise de location
d’automobiles n’a pas eu le succès escompté. En 2007, la société et Holdings ont
fait faillite suivant les réclamations des créanciers qui étaient de plus de
20 000 000 $. Le syndic de faillite pris une action contre Holdings et
sa corporation sœur en vue d’aller chercher les actifs qui avaient été transférés
par Holdings à sa compagnie sœur pour payer les créanciers de la société.

La cour suprême de la Colombie-Britannique
et la Cour d’appel
de la Colombie-Britannique
ont rendu une décision en faveur du syndic de faillite. La compagnie sœur a été
forcée de retourner les actifs qu’elle avait reçus suivant la transaction « papillon »
pour payer les créanciers de la société. Les cours de la Colombie-Britannique
ont retenu que la mauvaise foi ou l’intention malhonnête n’était pas nécessaire
pour déterminer qu’il y avait eu une cession frauduleuse opposable aux
créanciers. La Cour
mentionne qu’une transaction qui est le résultat d’une honnête intention qui a
pour effet de nuire aux intérêts des créanciers à proprement dit est une des
situations prévues par le Fraudulent
Conveyance Act
. Holdings aurait dû
protéger ses actifs en incorporant une nouvelle filiale pour être un associé de
la société mais ceci aurait empêché Holdings d’utiliser la déduction fiscale
reliée à la création de la société. Le fait que Holdings aurait pu structurer
son investissement dans la société d’une façon qui aurait pu protéger ses actifs
n’a pas été considéré comme pertinent par les cours de la Colombie-Britannique.

Considérant que les réclamations des créanciers n’étaient
pas existantes au moment de la transaction papillon et qu’aucune intention
malhonnête ou intention de frauder les créanciers existait, la décision fut un
choc pour plusieurs gens d’affaires et conseillers. Bien qu’il s’agisse d’un
cas d’application d’une loi de la Colombie-Britannique,
il n’est pas impossible qu’un raisonnement similaire soit appliqué dans
d’autres provinces.

Au Québec, l’action paulienne permet à un créancier qui
subit un préjudice suivant un acte juridique, généralement un transfert, fait
par un débiteur en fraude de ses droits, de présenter une requête devant la Cour pour annuler l’acte
juridique.

L’article 1634 du Code civil du Québec (reproduit ici-bas)
contient un langage qui pourrait permettre à une cour du Québec de prendre une
décision dans le même sens que la décision de la Colombie-Britannique
dans le dossier Botham.

1634. La créance doit être
certaine au moment où l’action est intentée; elle doit aussi être liquide et exigible
au moment du jugement sur l’action.

La créance doit être antérieure à
l’acte juridique attaqué, sauf si cet acte avait pour but de frauder un
créancier postérieur.

La décision Bothman démontre qu’une planification fiscale
doit en premier prendre des considérations fiscales, mais par-dessus tout considérer
tous les éléments d’une entreprise et les lois en vigueur. Il n’est pas
nécessaire de mentionner qu’une bonne planification fiscale doit également
prendre en considération les éléments personnels, familiaux et toutes les
autres considérations non fiscales.


1 Abakan & Associates Inc. v. Blaydon
Investments, 2008 BCSC 1547

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